jeudi 4 octobre 2007

Illusion d'une lettre égarée

sendmeacardwishmeeverythinguwant5786272007augkuj

Bonjour Christine, ma belle Christine,

Je suis au bord de ma fenêtre, je regarde les voitures passer, ça me donne l'impression de flotter au dessus de la ville. Si tu savais comme j'ai hâte de te revoir... L'été s'est voulu malicieux, passant d'un temps maussade aux couleurs grisantes à un temps ensoleillé plus qu'étouffant, où la moindre petite activité devenait fastidieuse. Tu dois être bien plus heureuse là haut, dans ta petite maison avec tes chèvres.

Savais-tu que Minou s'en était allé ? Grand père avait vu juste, encore une fois. Je t'enverrai les dernières photos que j'ai réussi à prendre de lui, j'attends juste que le labo ait finit de développer ma pellicule. Mes vacances approchent à grands pas, plus que deux semaines et je m'en irai rejoindre les plages de sables fins pour lézarder toute la journée, bercé par les bruits des vagues, tandis que le monde sera en pleine activité... Tu dois connaître cette sensation bien mieux que moi. Christine, que j'aimerai te revoir... Prendre un chocolat à quatre heures devant la télé en se blotissant sous la couette, comme quand nous étions petits...

Il parait que tu as trouvé un nouveau travail, ça a du rassuré Eric. Ca me rappelle quand vous aviez emménagés à deux pas de la maison, un peu avant le mariage de Cathy. Qu'est ce qu'on rigolait à cette époque, c'était bien avant tout ça. On allait tous ensemble au parc les dimanches après-midis pour pique-niquer, et tu me ramenais tout le temps un petit pot de confitures. Je crois que Pierre a toujours été jaloux de nous savoir aussi proches. C'est peut-être pour ça qu'il s'empiffrait de sucreries.

J'ai essayé de t'appeler la semaine dernière pendant que j'étais au centre commercial, mais je n'ai jamais réussi à t'avoir. Et tu sais combien je déteste parler à un répondeur téléphonique. Hier j'ai emmené la petite Chloé à l'animalerie, histoire de la faire sortir un peu de chez elle et lui faire oublier qu'elle est différente des autres. Tu aurais du la voir rire quand l'un des chiots grattait la vitre comme s'il voulait lui sauter dessus pour se jeter dans ses bras. Mais je crois qu'à grandir elle préfèrera les chattes.

En sortant de l'animalerie, j'ai cru voir Jeanne, mais je me suis rappelé qu'elle était morte. Je me suis souvenu de la dernière fois que je l'ai vu, avant son accident. On était allé manger des glaces, j'en avais pris une au chocolat, et elle à la fraise. C'était bon, cette sensation de froid en plein été, comme si on croquait la banquise à pleine dent au beau milieu d'un désert. Et elle se léchait les lèvres comme si elle avait envie de faire l'amour. Je l'avais ramené chez elle, et je lui avais demandé de penser à prendre la cassette du baptèm de Vanessa avant de partir. Je ne l'ai toujours pas vu d'ailleurs.

Hier, Christine, j'ai cru que j'avais perdu la tête. Je me suis réveillé dans ma salle de bains, sur le tapis de la baignoire. J'ai regardé les ciseaux qui trainaient sur le parquet. Quelques cheveux à côté. Pas un bruit n'est venu rompre le silence de la pénombre, cette partie du monde était en sommeil pendant encore quelques heures. Je me suis levé, dificilement, pour me diriger vers la salle à manger. Je sentais mes mouvements faibles et lourds qui chatouillaient l'air renfermé de la pièce éclairée à la seule lueur d'une grosse bougie blanche à demi-consumée. Je ne me rappelle pas de ce qui s'est passé avant. Tu te souviens, la dernière fois que tu m'avais retrouvé près du rosier dans le jardin de maman ?

J'aime bien t'écrire sur des feuilles de papier vert, ça rend mon écriture moins moche. J'espère que tu ne m'en voudras pas. Il commence à se faire tard, et mes yeux ont de plus en plus de mal à distinguer le papier. Je vais poser mon stylo plume et descendre dans la rue donner les restes du repas de ce soir aux petits chats de gouttières. Je pense fort à toi, comme chaque jour.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire