dimanche 21 septembre 2008

La personnification de l'inutilité

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Ne buvez-vous jamais de thé dans votre palace doré ?

Quand je pars pour ma pause café au huitième étage, il m'arrive souvent de prendre l'ascenseur avec Monsieur Ponctuel. Chaque fois, je regarde sa chemise trempée, et pendant que je retiens ma respiration pour éviter son odeur corporelle qui me donne la nausée, je cherche à comprendre ce qui peut provoquer ses retards répétés. Mais je préfèrerai que l'ascenseur lâche et nous emporte en enfer plutôt que d'avoir à le lui demander directement. Monsieur Ponctuel regarde sa montre, mais il sait tout aussi bien que moi qu'il n'est comme à son habitude pas arrivé à temps pour son rendez-vous matinal. Les portes s'ouvrent mais les fauteuils dans l'entrée son vide. Triste constat pour le demeuré de service. L'autre s'étant tirée bien avant qu'il ne débarque comme une fleur, il se sentit tout penaud lorsqu'il s'aperçut qu'il devrait partir tout seul. Il ne lui fallut que trois secondes pour s'en remettre.

Car il était du genre à se voiler la face, refusant d'affronter la réalité. Toute sa vie, Monsieur Ponctuel n'avait été qu'un raté, et il le demeurerait jusqu'à la fin de ses jours. Mais c'est que Monsieur Ponctuel était trop con pour se rendre à l'évidence, aveuglé par les flatteries du monde à son égard. Et Monsieur Ponctuel en grand qu'il voulait se faire passer, mais petit fils à papa qu'il était, dépensait sans compter... seulement pour lui-même. Après tout, les autres, c'est de la merde. Non content de m'avoir imposé sa présence dans l'ascenseur, voici qu'il vient gâcher ma pause en venant en salle de repos. Et les autres dégénérés qui grouillent à cet étage de lui faire de grands sourires hypocrites et de lui poser tout un tas de questions toutes plus stupides les unes que les autres, comme s'ils s'intéressaient réellement à sa vie. Quoiqu'en y réfléchissant bien, je me demande si qui baise des trainées n'est pas bien monté. Oh Monsieur Ponctuel, j'aimerai tant que tu me dises comment tu fais pour te supporter. Oh Monsieur Ponctuel, j'aimerai tant te brûler le visage avec mon café.

dimanche 14 septembre 2008

Pre-mortem

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Tout semble si calme plongé sous l'eau,
Y règne pourtant le même chaos...

Au loin sur les rochers, la carcasse d'une sirène à demi écaillée pourrit sous les rayons étouffants du soleil. Tu me prends par la main pour danser au milieu des vagues. L'eau salée nous ronge la peau, mais qu'importe, tant qu'on est deux, on est heureux. Nous revenons, trempés, pour nous étendre sur cette plage de sable fin peuplée d'ordures en tout genre. Les doigts jouant avec quelques vieux mégots, nous observons les gouttes sécher sur nos peaux, ou ce qu'il en reste. Et notre chair ainsi exposée commence alors son douloureux travail de cuisson. Plus besoin de parler lorsque l'on est au bord de l'inconscience. Pour tuer le temps, je grave ton prénom sur ma peau avec un morceau de verre. J'aimerai me trancher de toute part, mais ma serviette imbibée de sang devient de plus en plus collante. Bien vite les brulures du soleil me font tourner la tête. Alors, chacun de notre côté, nous creusons notre trou au milieu des grains de sable, prêt à s'y réfugier en attendant que la lune nous appelle.

Je m'enfonce sous terre dans un vaste tunnel sombre, et je ne t'entends plus. Des minutes s'écoulent ou je perçois au dessus de moi le bruit des vagues qui achèvent leurs tristes vies sur les rebords de la terre. Un bruit lointain semble pourtant se rapprocher. Qui d'autre que toi pourrait me retrouver même six pieds sous terre ? Tout s'intensifie tandis que le sable autour de moi tremble davantage. Il est la... Il est tout prêt... Mon petit refuge souterrain voit d'un coup l'une de ses parois de sables trembler pour s'écrouler. Dans la pénombre, je devine une forme étrange assez volumineuse. Un hurlement monstrueux transperce mes tympans, et je distingue un immense ver de sable visqueux aussi immonde qu'effrayant. Coincé contre le mur de sable, je ne peux plus m'enfuir. A peine le temps de sentir mon cœur s'emballer qu'il s'élance sur moi, et j'aperçois dans sa gueule grande ouverte des morceaux de ton cadavre encore frais. Oh mon amour, je te l'avais promis : à tout jamais nous serons réunis !