Au loin résonne la comptine des fous,
Et mon coeur sens dessus dessous...
Depuis plusieurs jours, les volets demeurent clos. Battus à mort, ils risqueraient fort de tomber si d'aventure ils étaient ne seraient-ce qu'entr'ouverts. Les bruits qui émanent d'un lointain souvenir se mêlent à ceux des personnages qui meurent à l'écran. Le visage collé contre la vitre, il n'y a plus rien à faire, si ce n'est apprécier à sa juste valeur toute l'étendue de son sinistre désarroi. Le soleil hachuré cède facilement aux avances de la nuit, à moins que ce ne soit ce qu'il ait ingurgité qui l'aide à se perdre plus facilement dans les dédales du temps. Au milieu du vacarme imaginaire, il tourne sur lui-même en murmurant à l'envers. Ses yeux rouges et cernés lui montrent tout ce dont il désire, mais il sait que bientôt il verra ce qu'il l'effraye le plus. Alors, il trouve un peu de réconfort en regardant la petite poupée scarifiée aux cheveux roses qui danse avec grâce en le gratifiant de son plus beau sourire.
Le temps passe, impossible à saisir. Un mégot à la main, il épluche ses sentiments devant un verre de whisky. A plusieurs reprises, il lui semble sentir ses yeux révulser, alors il tremble d'un coup sec et se ramène violemment à la réalité. Il y a bien longtemps que son monde n'a pas tourné à l'endroit. Derrière les murs se déchaine la folie. Il se décide à se jeter dehors, titubant péniblement dans un froid hivernal auquel se sont alliées les puissances du vent. Les muscles endoloris révèlent leurs faiblesses, mais à ses yeux, il n'y a rien de mieux que de se sentir mourir à même le trottoir. La lune ce soir est aussi belle qu'une pilule blanche. Aucune prière ne serait assez forte pour le délivrer de sa démence. Condamné par sa propre volonté, son corps se meurt lentement tandis que l'esprit jouit du spectacle de sa déchéance. Le chahut des murmures s'estompe petit à petit. Au milieu des rafales, le soulagement de l'âme.